Adapter la gestion forestière au changement climatique sotie dans le VERCORS de la section BAUGES

Synthèse du compte rendu technique de la visite forestière du 16 mai 2025 organisée par le Groupement des Sylviculteurs des Bauges 73, l’UFP 74 FRANSYLVA Section Bauges et le PNR du Massif des Bauges

Établir des trajectoires sylvicoles en contexte changeant

Matinée : Visite de la forêt communale de Die avec Colas Rysiewicz (ONF)

Établir des trajectoires est crucial dans un contexte de changement climatique car cela permet de se poser toutes les bonnes questions vis-à-vis de son peuplement :

  • Que peut-on faire ?

Un inventaire (surface terrière*, accroissement*) est réalisé pour connaître les potentialités.

  • Que veut-on faire ?

Des objectifs sont fixés en termes de proportions d’essences (une bonne place est laissée à la diversité) et de diamètres (ne pas se focaliser uniquement sur la régénération !).

  • Que doit-on faire ?

« Aller contre la dynamique naturelle coûte toujours plus cher : si on a de la régénération en hêtre, autant viser du bois de hêtre de qualité ! »  Colas Rysiewicz, Technicien à l’ONF

En comparant l’objectif souhaité à 100 ans et l’état actuel, un plan d’actions est défini.

Les hêtres de la forêt communale de Die sont mieux valorisés que les sapins car ils sont utilisés pour les

Deux exemples d’actions pour atteindre les objectifs de qualité, de vigueur et de diversité

Des travaux sylvicoles pour atteindre des objectifs de qualité et de vigueur : Les arbres d’avenir* sont identifiées puis détourées*. Le bon moment : lorsque les tiges sont élaguées naturellement sur 25 % de leur hauteur finale. Les branches restantes devront rester vivantes pour garantir un houppier vigoureux.

Arbre d’avenir identifié par un marquage bleu

Arbre annelé (écorcé en anneau dans le but de provoquer sa mort dans les 2 ans)

Des plantations en enrichissements pour atteindre des objectifs de diversité : érable sycomore, érable plane et tilleul sont plantés par 5 à haute densité sous des épicéas de 70 ans. 140 plants pour 7 ha, soit une diversification à faible coût et donc à faible risque. Le sol est

travaillé par sous-solage pour ne pas retourner les horizons.

Le point vocabulaire

Surface terrière : Somme des sections des troncs à 1,30 m, en m2/ha. Permet de caractériser la compétition entre les arbres. Se mesure avec un relascope.

Accroissement : Traduit la croissance annuelle des arbres. Permet de connaître le capital d’équilibre (exprimé en surface terrière), quantité de bois sur pied optimale, qui garantit à la fois un bon fonctionnement de l’écosystème, une production continue de bois de qualité et une régénération naturelle diffuse.

Arbre d’avenir : Tige que l’on choisit et pour laquelle on va cibler les interventions lui permettant d’optimiser sa qualité et sa vigueur.

Détourage : Enlèvement de tous les arbres qui sont en contact avec des

tiges d’avenir et qui gênent leur développement optimal.

Des enrichissements en anticipation de la récolte d’une pessière

Après-midi : Visite de la propriété de John et Carole Astic à Vassieux-en-Vercors

en 2023 John Astic a acheté en 1995 11 hectares d’épicéa. Il a tracé une piste forestière en 1996 et a réalisé des éclaircies des épicéas en 2000, 2008, 2013 et 2023. Les arbres d’avenir sont élagués sur 6 m.

Pour anticiper la récolte de la pessière et ainsi éviter une mise à blanc de parcelle (brutal et pouvant avoir des conséquences néfastes) et permettre l’étalement des revenus, des plantations en enrichissements sont réalisées dans des trouées naturelles ou artificielles. Les dispositifs de plantation sont variés : en ligne sous couvert, en placeaux plus ou moins grands (le plus grand fait 3000 m2), etc.

Des plantations optimisées et protégées

Une analyse de sol est faite systématiquement pour choisir les essences. Le sol est travaillé avec un sous-soleur permettant de faire de petites potées de 60-70 cm de profondeur, 2 ou 3 mois avant la plantation, ce qui économise un dégagement ! Les plants sont achetés racines nues et pralinés avec un mélange de bouse de vache, compost, terre végétale et eau de pluie.

Les protections contre les dégâts de gibier sont elles aussi variées :

– pour les feuillus : 2 Tubex de 1m20 (photo ci-dessus)

– pour les résineux (besoin de plus de place) : gaines

– répulsif CERTASOL (couleur bleue qui fait fuir le gibier)

– entretien à la débroussailleuse au lieu du broyeur

Au total coût moyen de 7€ / plant mais 93 % de reprise

Essences plantées :

– zones les plus fertiles : chêne sessile, noyer hybride, érables plane et sycomore, pommier, tilleul à petites feuilles, hêtre

– zones sous abri :  le hêtre, qui aime l’ombre

– zones superficielles : chêne pubescent, pins de Salzmann et de Calabre

Si aujourd’hui le débouché de ces essences est inconnu, la qualité des arbres produits assurera leur valeur ajoutée. La régénération naturelle est laissée pour un potentiel complément aux plantations.

Pour conclure, l’adaptation de la gestion forestière au changement climatique passe par le renouvellement forestier mais aussi par l’adaptation de la gestion courante et par la planification.

Face à ce défi, le, partage d’expériences entre forestiers est crucial afin de capitaliser sur les réussites et les échecs de chacun

article et photos du PNR M BAUGES